Originaire de Guyane, en Amérique du Sud, Margaux RUCITA Wong est une créatrice de mode et de textile qui vit et travaille au Burundi depuis 2009. Mère de cinq enfants, elle conçoit des vêtements, des textiles et des bijoux. Après 14 ans de dur labeur, nous sommes allés à sa rencontre pour découvrir sa boutique et comprendre comment elle travaille depuis toutes ces années, dans un secteur d’affaires aux multiples challenges.
Née en 1982, à Georgetown, en Guyane, Margaux RUCITA a commencé à s’intéresser à la mode dès son bas âge. Elle confie que c’est sa mère qui l’a initiée à faire des dessins et des colories en forme de l’art. « Ma mère prenait des grandes feuilles de papier et les mettez aux murs de notre maison en bois, pour que je puisse colorier, écrire, dessiner et faire tout ce que je voulais. », Indique-t-elle. Plus tard, à l’âge de 18 ans, elle a vu ses arts devenus plus significatifs et vendables. A cette époque, elle fréquentait l’université, vers les années 2000.
« J’ai commencé l’art d’une manière significative lorsque j’étais encore à l’université. J’étudiais et j’avais envie de porter quelque chose de différent de mes camarades de classe. J‘ai commencé à confectionner des robes maxi. À l’époque, je savais déjà comment faire. Je faisais donc mes études et mes peintures à la main. À l’époque, un morceau de tissu pour une robe pouvez me couter environ 5 dollars. Ma mère avait déjà une machine à coudre, j’ai acheté le tissu et j’ai fais une robe. Je l’ai apporté à l’école et quelqu’un m’a demandé où j’avais trouvé la robe. Oh, puis-je l’avoir ? Puis-je vous l’acheter ? a-t-elle dit. Et je me souviens que j’ai vendu cette robe pour 50 dollars. C‘est ainsi que j’ai démarré mon activité».
Naissance de la Marque, « Margaux Wong »
Après avoir décidé de démarrer le travail d’artiste et de designer, Margaux a mis en place une entreprise pour pousser plus loin son art vestimentaire. Elle a ainsi créé « Margaux Wong », une marque qui deviendra petit à petit célèbre, sur trois continents (l’Amérique, l’Europe et l’Afrique). Grâce à son entreprise, Margaux est devenue une véritable citoyenne du monde. 23 ans, elle s’installe à Londres pour partager son temps entre des cours à la « London College of Fashion » (Angleterre). C’est à Londres qu’elle a rencontré son mari burundais, qu’elle va suivre au Burundi en 2009. Le Burundi qu’elle appelle aujourd’hui son pays. Elle y a construit une vie et une entreprise au cours des 14 dernières années.
« Ma marque a été créé en Guyane, d’où je suis originaire, il y a donc 22 ans, avant même que je ne connaisse l’existence du Burundi. J’ai créé Margot Wong, qui est le nom que m’ont donné mes parents. J’avais environ 18 ans lorsque j’ai créé la marque et j’ai commencé par fabriquer des vêtements et des bijoux. Mais aujourd’hui, je me concentre sur les bijoux. Lorsque j’ai déménagé au Burundi, j’ai fait un effort pour m’approvisionner en matériaux locaux sous-utilisés. Après avoir voyagé dans la région, j’ai eu envie de faire quelque chose de différent avec la corne de vache et de trouver des artisans capables de la fabriquer. Nous utilisons de la corne de vache qui est jeté après que les vaches aient été abattues. Cela signifie que nous utilisons, littéralement, des choses que l’on peut trouver partout dans ce pays. C’est beaucoup de travail, mais ce que je dirais, c’est qu’il ne faut pas penser à tout ce que cela implique. »
Margaux et le Burundi, une histoire de réussite
Alors que pas mal d’artistes, photographes, mannequins et d’autres jeunes très talentueux qui vivent au Burundi, estiment qu’ils doivent quitter le Burundi pour pouvoir réussir, Margaux dit que la réussite est partout. Qu’il suffit juste de ne pas abandonner. « Il faut continuer à avancer. Et même lorsque les choses sont difficiles, vous continuez à avancer jusqu’à ce que vous atteigniez vos objectifs. Je dis toujours aux jeunes que c’est ici que j’ai réussi. Pour moi, l’important n’est pas de savoir où l’on est, mais comment on utilise ce que l’on a. Si vous êtes en mesure de le faire dans un endroit où les ressources sont très faibles, lorsque vous vous rendrez dans un endroit où vous disposez de beaucoup de ressources, vous vous épanouirez et vous obtiendrez d’excellents résultats ».
Pour Margaux, il faut toujours commencer par la vision et le rêve. Même si c’est un rêve stupide ou quelque chose qui pourrait susciter les moqueries. « Au fur et à mesure que vous grandissez et que vous commencez à pratiquer votre art ou quoi que ce soit d’autre, lorsque vous exercez votre métier, vous vous développez et vous attirer les gens. Les personnes que vous attirez maintenant peuvent commencer à investir en vous. Pas nécessairement sur le plan financier mais en tant que mentor, en tant que client. Vous apprenez de ces personnes au fur et à mesure que vous gagnez en confiance ou que vous vous développez de plus en plus. »
Margaux Wong, ses clients et le monde du numérique
Aujourd’hui, à l’heure des médias sociaux, Margaux affirme qu’il est beaucoup plus facile d’être dans sa chambre pour démarrer sa petite entreprise et accéder à des millions de personnes dans le monde entier. « C’est tellement facile maintenant. Il est important d’utiliser ce que nous avons. Bien sûr, il y a l’administration et il y a beaucoup de travail en amont. Certainement, les médias sociaux, mais aussi l’établissement des relations, la mise en réseau avec des mentors internationaux et des personnes qui connaissent le secteur mieux que moi », dit-elle ?
Malgré cela, Margaux déplore que les burundais n’aient pas encore cette coutume d’utiliser les réseaux sociaux ou le numérique pour acheter des choses en ligne. « Nous sommes sur Instagram et nous avons également un site web. C’est margotwong.com. Mais, comme nous sommes au Burundi, plusieurs clients n’ont pas d’accès au paiement en ligne. Ils ne peuvent même pas payer directement sur le site web. Souvent, ils me contactent par l’intermédiaire du site web et par là nous pouvons passer la commande. C’est l’un des défis à relever pour faire des affaires au Burundi. »
Quelle est la place de Margaux Wong au monde ?
Selon la patronne, Margaux Wong est maintenant connue comme l’une des meilleures marques de bijoux en Afrique. Elle a de nombreux fans, clients et des partenaires dans le monde qui continuent à la soutenir. Ses produits ont déjà figuré sur le catalogue des marques africaines du site de Beyonce, célèbre chanteuse américaine et sur d’autres grands sites de ventes en ligne.
« Je suis toujours le cerveau de l’entreprise. J‘ai mon équipe, j’ai mon atelier. Nous avons des artisans avec lesquels nous travaillons. Nous avons des comptables. Il y a différentes personnes sans lesquels je ne pourrai pas faire ce métier. Mais nous avons des partenaires. Pas des partenaires financiers. L’entreprise s’occupe essentiellement d’elle-même. Nous avons appris à réinvestir dans l’entreprise au fil du temps. J‘espère que dans un avenir très proche nous serons en mesure de trouver et de mettre en place un système de gestion de l’information, du financement, des partenaires commerciaux, d’investisseurs providentiels, des personnes désireuses de nous voir passer à la vitesse supérieure. »
Grandes réalisations, Source de financement et perspectives d’avenir
Comme toute autre entreprise, Margaux Wong a déjà réalisé et participé à des expositions internationales. Tout cela avec pour objectif d’agrandir le réseau et le marché d’écoulement. La patronne confie qu’elle a des partenaires commerciaux à venir, des gens qui veulent stocker leurs bijoux.
« J’ai participé à un programme d’incubation, avec « l’Ethical Fashion Initiative ». Il s’agit d’une agence de Nations Unies. Ils m’ont vraiment aidé et m’ont tenu la main ces trois dernières années pour m’aider à grandir où je me sentais bloqué. L’année dernière j’ai participé à la semaine de la mode au Portugal et à Paris. Cette année j’ai fait une pause pour me reposer à cause de certaines choses que j’ai vécu personnellement. Mais nous avons beaucoup de fans et de supporters et il se passe quelque chose même à l’autre bout du continent. Pour l’instant nous sommes travaillons avec « Industry Africa » qui est une plateforme en ligne. Il s’agit, en fait, de la première plateforme de mode de luxe en Afrique. Je crois en une croissance lente. Je ne suis pas pressé d’être au sommet, mais la constance est très importante », explique Margaux Wong.
A 40ans, Margaux prépare déjà un successeur
Margaux n’a pas voulu que son art disparaisse si tôt. Elle a ainsi facilité l’accès aux bijoux à sa fille de 15 ans. Comme l’indique Margaux, sa fille est actuellement en train de concevoir sa première collection. Elle crée des vêtements de salon, ce que les jeunes portent aujourd’hui. Des pantalons, des sweats à capuche, des shorts, des hauts de forme ou d’autres choses du même genre.
« Quand elle m’a dit, ‘’maman c’est ce que je veux faire’’, pour moi c’était tout, car quand on fait ce métier on le fait d’abord pour soi. Vous ne savez pas combien de personnes vous inspirez. Vous ne savez pas combien de personnes sont touchées et encouragées par ce que vous faites. Par votre combat. Ma propre fille m’a donc regardé. Elle m’a connu telle que je suis maintenant. Depuis qu’elle était bébé, elle m’a vu grandir. Elle veut maintenant créer sa propre entreprise dans le domaine de la mode et elle commence plus jeune que je ne l’étais quand j’ai commencé. J‘ai commencé à 18 ans, elle en a 15. Et je ne lui ai pas dit non. Pour l’instant, je ne l’ai pas poussé à devenir styliste. C‘est juste quelque chose qu’elle a découvert et je suis heureuse qu’elle soit inspirée de poursuivre quelque chose qu’elle aime, parce qu’elle a vu sa mère le faire », dit-elle.
A côté de l’histoire de la passion, Margaux RUCITA Wong, indique qu’une autre histoire se cache derrière ses produits. Pour elle, l’art est un moyen de thérapie, qui l’aide à surmonter les moments difficiles. « L’art c’est quelque chose qui remonte à mon enfance. Je viens d’un foyer où ma mère n’était pas mentalement bien. Et l’art est un moyen de thérapie, je suppose. Ainsi le fait de pouvoir exprimer mes sentiments, mes rêves et mes désirs par le biais de la création m’aide à rester en bonne santé et à me développer », confie la créatrice de mode.
Faustin BIRINDWA