Jadot NKURUNZIZA : 19 ans à planter des arbres, pour quel bilan ?

Jadot NKURUNZIZA : 19 ans à planter des arbres, pour quel bilan ?

Jadot NKURUNZIZA, jeune environnementaliste burundais ©Akeza.net

Il y a près de 19 ans, Jadot NKURUNZIZA, jeune environnementaliste burundais commençait une longue aventure avec les arbres. Celui que l’on surnomme « Giti (arbre) » plante des arbres à tour de bras dans les quatre coins du Burundi. Une passion qui, aujourd’hui, prend des allures de vocation. Cette passion, il essaie de la transmettre au mieux. Mais après autant d’années à planter des arbres, quel bilan peut-on faire de son parcours ?

 

Les débuts de « Giti »

Jadot NKURUNZIZA est initié par son grand-père. C’est lui qui l’introduit à mère nature. C’est son grand-père qui lui apprend à aimer la nature et à la protéger. « Petit j’arrosais les fleurs à la maison, surtout lorsque j’allais en vacances chez mon grand-père. C’est lui qui m’a appris l’importance des arbres. Il me disait que sans les arbres, nous ne serions capables de rien. Ni manger, ni avoir un toit ou encore des meubles pour nos maisons, écoles et bureaux. Prenant à cœur ses paroles, j’ai décidé de planter les arbres », nous confie-t-il.

C’est en 2001 qu’il commence à planter des arbres un peu partout dans la ville de Bujumbura et à l’intérieur du pays. 19 ans dans la lutte pour la protection de l’environnement qui lui ont valu le surnom de « GITI » (arbre en Kirundi).

Ces années lui ont permis de gagner une certaine notoriété auprès des jeunes et des responsables locaux. Aux côtés d’autres jeunes, il est aujourd’hui l’un des visages de la protection de l’environnement au Burundi.

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Opération d’arborisation avec les jeunes de l’ETS Kamenge et du Rotaract ©Akeza.net

Mais en vrai, à quoi sert-il de planter autant d’arbres ?

Pour l’environnementaliste qu’est Jadot NKURUNZIZA, planter des arbres est vital. Aussi bien pour la protection des sols, la prévention contre les inondations ou même pour un paysage plus beau.

« Planter des arbres est plus qu’important. Si nous prenons l’exemple des versants des montagnes, nous nous rendons compte qu’ils ont tendance à s’affaisser lorsqu’il y n’a pas d’arbres plantés. Les eaux de pluies emportent le sol nu. Les arbres permettent de retenir ces eaux. D’un autre côté, dans un pays où l’agriculture est très présente, nous avons besoin de sols fertiles. Cette fertilité est apportée par les nutriments libérés par les arbres grâce aux eaux de pluies. Nous n’oublierons pas les arbres fruitiers qui sont importants pour notre alimentation. À cela s’ajoute que les arbres apportent de la beauté et de la fraîcheur à l’environnement », nous explique-t-il.

 

 

19 ans après, on fait le bilan

Lorsqu’on écoute Jadot parler de son activité, on imagine bien qu’il a dû planter des milliers d’arbres depuis le temps. Il faut dire qu’en 19 ans d’activité, le chiffre doit être lourd. Justement, parlons de ces chiffres. D’après le jeune environnementaliste, avec son association « Ça nous concerne tous », ce ne sont pas moins de 89 millions d’arbres qui ont été plantés dans Bujumbura et dans 16 autres provinces. Un chiffre très impressionnant. En même temps, avec près de deux décennies au compteur, il a eu le temps de marquer le pays de son empreinte. Jadot entretient, par ailleurs, quatre pépinières couvrant tout le Burundi (Bujumbura, Makamba, Ngozi et Gitega).

Si l’on ne prétend pas douter de son bilan, il reste légitime de se poser la question relative aux lieux qui ont accueilli ces arbres. Toujours selon Jadot NKURUNZIZA, plusieurs endroits ont pu bénéficier des arbres plantés par lui et par beaucoup d’autres. Il s’agirait notamment des rives, des rivières Ntahangwa et Muha, des écoles telles que le Lycée du Saint-Esprit, le Lycée Gikungu, le Lycée du Lac Tanganyika et bien d’autres écoles. On pourrait également citer le boulevard Mwezi Gisabo (ex 28 novembre) ou encore la Route Nationale 5 (RN5) reliant Bujumbura à Cibitoke.

C’est un travail qui rend Jadot fier. « Cela fait vraiment plaisir de passer sur le boulevard du 28 novembre et de voir les arbres que l’on a planté. Cela nous prouve que nos efforts n’ont pas été vains. Que nous atteignons petit à petit notre objectif », dit-il.

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Visite des pépinières et arborisation des abords du palais « Ntare Rushatsi » ©Akeza.net

Au-delà de ses activités habituelles, Jadot a initié, depuis 2018, le programme « Twese Dusharize Igihugu ». Celui-ci consiste à embellir les espaces publics des principales villes du Burundi, notamment en plantant des fleurs. Ce programme a permis d’apporter une touche de beauté à des endroits tels que le monument du Soldat Inconnu, le Boulevard de l’Uprona ou encore la place des Nations Unies.

Pour tenir autant d’années, entretenir des pépinières et planter autant d’arbres, il faut des moyens importants. D’aucun se dirait que le jeune environnementaliste devrait trouver son bonheur financier dans son activité. Jadot affirme qu’il n’y gagne aucun sou, si ce n’est le nécessaire pour entretenir les pépinières. « Je ne le fais pas pour gagner de l’argent, je le fais pour partager mon savoir aux autres. Il arrive que l’on gagne de l’argent, mais cela n’arrive que tous les deux ans en moyenne. Quasiment tout est réinvesti pour entretenir les pépinières et organiser les événements », dit-il.

La plus grande fierté de Jadot est d’avoir insufflé un renouveau environnemental au sein de la jeunesse burundaise. Quoi que le champ reste vaste, il peut déjà se féliciter d’intéresser de nombreux jeunes lors des différentes opérations qu’il lance chaque année.

 

 

Mode ou prise de conscience ?

L’engouement massif que suscitent les activités de Jadot NKURUNZIZA laisse certaines personnes perplexes. Selon Jadot, il est important de parler aux jeunes avec un langage qui leur est propre. Là où de nombreuses personnes considèrent ces rassemblements comme de simples moments de détente pour des jeunes en manque de loisir, pour Jadot c’est une façon de glisser insidieusement l’idée de la lutte pour la protection de l’environnement à ces jeunes.

« La jeunesse constitue la grande majorité de la population burundaise. Notre objectif est de pousser les jeunes à aimer la nature et à transmettre cet amour à d’autres jeunes. Mais pour intéresser un jeune, il faut lui apporter une chose à laquelle il s’identifie. C’est pour cela que nous organisons ces activités de cette manière-là. L’idée, c’est de lier le plaisir qu’il a de se retrouver avec les autres avec l’activité de planter des arbres. Ainsi les deux deviennent des choses auxquelles il prend plaisir », nous explique l’environnementaliste.

Et d’ajouter : « Cela marche parce que, que ce soient de jeunes professionnels ou des étudiants, ils réussissent à attirer leur entourage. Par la suite, ils veulent planter des arbres chez eux. »

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Opération d’arborisation à Sororezo (Bujumbura) et Bukeye (Kayanza) ©Akeza.net

Cette psychologie basique marche puisque les activités du jeune environnementaliste ne cessent de drainer du monde. Sont-ils véritablement motivés par la défense de la nature ? Seul le temps pourra nous le dire.

Toujours est-il que des activités similaires sont aujourd’hui lancées par d’autres. Tous semblent être aussi motivés que Jadot.

En se lançant dans le combat pour la protection de l’environnement, Jadot NKURUNZIZA avait bien un objectif. Celui de transformer le Burundi en un pays écologique où la nature est respectée et préservée. Étant lui-même jeune, la meilleure manière de parvenir à son objectif était celle de mettre à contribution la jeunesse pour un Burundi plus vert d’ici 20 ans. Un objectif qui lui tient à cœur et pour lequel il semble prêt à tout donner.

En attendant que ce jour arrive, Jadot NKURUNZIZA continue à planter des arbres et fait de la sensibilisation pour une jeunesse burundaise plus soucieuse de l’environnement.

 

Moïse MAZYAMBO