Préparer un festival tel que Buja Sans Tabou, avec toute la particularité qui le caractérise, c’est explorer un monde aux multiples possibilités. C’est découvrir et expérimenter une autre façon de faire du théâtre. Cette expérience, les comédiens de la troupe « Ouf » la vivent au quotidien depuis près de 3 semaines. Programmés pour jouer dans le quartier de Bwiza, les 5 comédiens vivent une expérience unique. C’est d’autant plus incroyable que leur pièce sera présenté dans la mythique boite de nuit « 5 sur 5 ». Un endroit à l’histoire aussi riche que le quartier qui l’abrite.
Il serait difficile pour le journaliste que je suis (avec toute la prétention que cela implique) de véritablement saisir l’impact que peut avoir une telle expérience sur le mental d’un comédien. Troquer la solennité d’une salle de répétition classique pour un décor hors du commun tel qu’une boite de nuit doit être déroutant. Autant que cela est dépaysant, il enrichit l’acteur qui fait face à une réalité qui était, jusque-là, vécue comme un mythe.
Jouer à 5 sur 5, va au-delà même du théâtre. C’est une expérience humaine raisonnante. Une de celles qui confirment le mythe. Car, s’il est vrai qu’ils ont appris de nombreuses choses sur Bwiza, à travers les historiens et les anciens, le contact avec les habitants a eu un effet marquant. De l’aveu d’Huguette IZOBIMPA, cela leur a permis de comprendre l’esprit qui anime ce quartier depuis des décennies. Et au-delà de la belle histoire, la comédienne retient une chose de Bwiza : « La Liberté ».
« Quand je viens ici, je suis libre. Des fois quand tu vas dans des quartiers, tu réfléchis à comment sera le contact avec les gens, à comment te tenir. Tu restes constamment sur tes gardes et tu finis par te comporter bizarrement. Mais ici, je sais que je peux venir à 5 sur 5 à n’importe quel moment, je peux me promener en babouche. Si je n’ai pas d’argent pour me déplacer, je peux aller de la première à la 10e avenue à pied sans avoir honte et demander ma route si je me perds. Il y a un mélange de culture qui apporte une certaine liberté. Je peux essayer de parler en swahili même lorsque je ne le connais pas bien parce que je sais que même si je commets des fautes, ils ne vont pas se moquer et me mettre mal à l’aise parce qu’on est libre de faire ce que l’on veut comme on le sent. Et c’est ça qui est beau », raconte-t-elle.
Jouer à Bwiza serait donc une véritable expérience humaine. On est au-delà du théâtre puisqu’on va à la rencontre de l’autre, on apprend de lui et on découvre ces choses qui le rendent particulier. C’est rencontrer la légende et se rendre compte qu’elle est vraie.
Techniquement, jouer à 5 sur 5 est un vrai challenge pour les comédiens. Savoir que l’on va jouer sur la piste de danse, avec le public tout autour mais également à l’étage, demande non seulement d’apprendre à apprivoiser la scène mais également d’apprendre à gérer son attitude. « Il y a beaucoup de challenges qui entrent jeux. Jouer pour un public tout autour et à l’étage. Il faudra toujours se rappeler qu’il y a un public à gauche, à droite, devant, derrière et en haut. Faudra rester éveillé, toujours hausser la voix. C’est une nouvelle expérience et on a très hâte de voir ce que ça va donner », m’expliquait Arnold Banywerha, auteur de la pièce.
Au fur et à mesure de cette immersion dans les coulisses de Buja Sans Tabou, je me rends compte que ceci n’est qu’un simple festival. J’ai nettement l’impression de parcourir un livre qui à chaque chapitre m’ouvre les portes d’un monde que j’ignorais. Décidément, je ne suis pas à bout de mes surprises et la suite promet encore plus de belles choses.
L’aventure continue…
Moïse MAZYAMBO