Immersion dans les coulisses de Buja Sans Tabou 2020 (Part I)

Immersion dans les coulisses de Buja Sans Tabou 2020 (Part I)

21 mois ! Voici le temps que Freddy SABIMBONA et ses compagnons ont pris pour préparer la prochaine édition du festival « Buja Sans Tabou ». 21 mois de réflexion, de recherche, de travail acharné pour livrer, du 17 au 22 février prochains, la 4e édition d’un festival de théâtre qui repousse les limites de ce que l’on avait déjà vu. Sorti des salles pour arpenter les rues, « Buja Sans Tabou » ose proposer une approche différente de celle que l’on a toujours eu à propos du théâtre. L’on aurait envie de savoir comment se prépare un évènement comme celui-ci. Un de ceux qui sortent du commun. Et poussé par note curiosité, nous sommes allé voir. Nous avons passé du temps avec eux et même si nous n’avons pas tout compris du fonctionnement de l’esprit d’un artiste dans son processus de création, nous avons tout de même appris une chose. C’est que lorsqu’on le veut vraiment, on peut tenter l’impossible. Entrons ensemble dans les coulisses de cet évènement au visage particulier.

 

« Silence, ça crée… »

Il est 15h30 lorsque, mon photographe et moi, entrons dans les locaux de « Buja Sans Tabou ». Au milieu du calme de Kabondo, entre les chants d’oiseaux et le bruissement des feuilles dans les arbres, une mêlée de voix répète en sourdine le mot « Sakayonsa ». Comme  une forme d’incantation. Intrigant ! En nous approchant, l’on se rend compte que c’est la troupe des « Enfoirés de Sanoladante » qui répète une scène devant le regard questionneur du metteur en scène. Le metteur en scène, en même temps acteur et spectateur de ce qu’il essayait de construire faisait les 100 pas dans la pièce. Perdu dans ses pensées mais également conscient de ce qu’il voyait devant lui. Sans trop nous en rendre compte, nous étions spectateur du processus de création d’une pièce particulière. Sa particularité se trouvant dans le fait qu’elle se destine à être jouée devant un nouveau type de public. Un de ceux qui ne s’intéressent pas au théâtre. Trop intellectuel pour les uns, trop bourgeois pour les autres.

Pour ce public-là, le théâtre doit cesser d’être classique. Il doit leur ressembler. Il faut donc casser les codes du théâtre classique. Le déconstruire et le remodeler. L’exercice est difficile mais guère impossible.

C’est à ce même exercice que, dans une autre pièce de cette grande maison, d’autres acteurs travaillent.

 

La scénographie aussi compte

Alors que nous observons dans le silence le travail des acteurs, un bruit bien plus important vient déranger la solennité du moment que nous vivons. Un bruit perçant de scie électrique. Qui diable couperait du bois en plein après-midi ? Me demandai-je. Je me dirigeais vers l’arrière cours lorsque j’aperçu une équipe de 3 personnes, qui avait l’air d’être dans un autre univers. Celui-ci est fait de bois, de perceuse électrique, de marteau et de clous. C’est Christian BIGIRIMANA qui travaille au décor et à la scénographie. Il a cet important rôle de rendre concret le décor que les auteurs et metteurs en scène ont imaginé en créant leurs pièces.

Curieux, lui demandais-je : « Comment fais-tu tout ça ? »

« Eh bien, on échange avec les auteurs et les metteurs en scène. Ils m’expliquent ce qu’ils veulent pour leur pièce, on y réfléchit et on essaye de faire correspondre le décor à la pièce. Je lis également les pièces pour comprendre ce qu’il faut », me disait-il alors qu’il travaillait sur une construction pour la pièce des « Enfoirés de Sanoladante ».

A côté de lui, Dorine MUNEZERO, comédienne et apprenti, coupe du bois à la scie. Volontaire, elle a décidé de jeter son dévolue sur la scénographie. Et elle est contente d’apprendre. « En une semaine, j’ai beaucoup appris. Je sais me servir d’une perceuse, d’une scie électrique et même d’une scie manuelle », dit-elle en souriant, l’air fier d’elle.

En discutant avec ces 3 personnes, je finis par comprendre que la scénographie est aussi importante pour une pièce que son scénario. Elle place le décor, clarifie le contexte et permet autant aux acteurs qu’au public de vivre une scène. Et pour Christian, il y a autant de façons de faire de scénographies qu’il y a de pièces. « Cela change d’une pièce à une autre. Des fois on a besoin de monter tout un décor et des fois on se sert uniquement de l’espace à notre disposition. Par exemple pour la pièce des Enfoirés, Josué a voulu cette construction en bois alors que pour Claudia, l’objet principal des décors, qui est une carcasse de bus a été trouvé sur place. Pour ceux qui vont jouer à Bwiza, nous n’allons rien construire puisque le lieu où sera joué cadre déjà un peu avec la pièce. C’est vraiment en fonction de l’espace que l’on travaille le décor ».

Un endroit en perpétuel mouvement

Lorsque vous passez du temps dans les locaux de Buja Sans Tabou, on se rend compte d’une chose. C’est que l’endroit est en perpétuel mouvement. Entre les scénographes, les acteurs et l’administration tout le monde est en mouvement. La maison est vivante, elle bouge. Les troupes qui ont fini de répéter laissent la place aux danseurs. Ceux qui ne répète pas aident les scénographes ou discutent dans un coin sur différents sujet. Il y a ceux qui font des blagues, ceux qui envoient des mails, ceux qui conseillent les acteurs, ceux qui s’échauffent avant de commencer à danser et encore plus. « On est en shift permanent ici. On bouge tout le temps », me lance Freddy SABIMBONA.

 

L’espace d’un après-midi, j’ai eu un aperçu de comment les artistes créent, de comment ils se préparent. Mais je n’ai pas tout vu. Il me reste encore beaucoup à découvrir, beaucoup à apprendre sur les coulisses de cet évènement hors du commun qui vient, qui vient bientôt.

A suivre…

 

Moïse MAZYAMBO