Nourrir les populations en évitant de tomber dans le piège de l’agriculture intensive qui détruit les sols, tel est l’un des enjeux majeurs de notre ère. Répondre aux besoins en alimentation de la planète tout en protégeant l’environnement et les écosystèmes est aujourd’hui une urgence. Comme solution à cette question, plusieurs alternatives sont proposées. Et de l’avis de plusieurs, celle de faire recours à l’agriculture urbaine semble la mieux indiqué. Ce concept, qui est loin d’être une réelle invention, pourrait répondre aux soucis du moment et propose une forme d’équilibre entre l’alimentation des masses et la protection environnementale. Mais en réalité, de quoi parle-t-on et surtout quels sont concrètement les avantages de cette forme d’agriculture aux allures séduisantes ?
Difficile d’ignorer, à ce jour, le danger que semble représenter l’agriculture intensive. En effet, en plus d’affaiblir les sols, à cause de la monoculture et de l’utilisation presque non-stop, l’agriculture intensive représente aujourd’hui un danger pour les écosystèmes. Cela est causé notamment par l’utilisation des engrais chimiques et pesticide, la mécanisation de l’agriculture, l’utilisation d’hormones et d’antibiotiques et bien plus encore. Alors que les pays du monde prennent, d’une certaine manière, la mesure de l’urgence et militent aujourd’hui pour une planète plus écologique et durable, la recherche d’alternatives plus protectrices de l’environnement mais capables de suppléer à la dépendance aux produits de l’agriculture intensive est plus que souhaitée. C’est dans ce cadre que l’agriculture dite urbaine ou péri-urbaine devient l’une des solutions.
Cette idée a été avancé par le professeur Renée Manirakiza lors d’une série de conférence sur les villes du futur organisé par l’Union Européenne, L’institut Français du Burundi et l’Alliance Franco-Burundaise de Gitega. L’objectif étant de poser le débat sur l’avenir des zones urbaines en favorisant la protection de l’environnement par des moyens écologiques d’agriculture.
Entre alimentation saine et la protection de l’environnement
Nous l’aurons compris, il est impossible de dissocier l’agriculture urbaine à la notion de ville. En effet, comme son nom l’indique, celle-ci fait appel à des pratiques agricoles dans les villes et éventuellement en périphérie des villes pour satisfaire les besoins des habitants. Utilisant en général les petites villes, cette forme d’agriculture est également appelée « agriculture de proximité ». Dans ce sens où elle se pratique par les citadins pour leurs besoins les plus primordiaux en nourriture. S’appuyant sur des pratiques agricoles soucieuses de l’environnement, l’agriculture urbaine se veut moins gourmande en engrais, en pesticide et autres produits complémentaires pour fertiliser ou protéger les cultures. Elle a dans ce sens le mérite d’offrir des produits sains à la population.
Mais l’agriculture urbaine ne s’arrête pas à des simples vertus d’alimentation. Selon le Professeur Renée Manirakiza, agrégé de géographie et auteur du livre Population et Développement au Burundi ; l’agriculture urbaine contribue à la promotion d’une ville durable, en plus de nourrir convenablement les populations. En effet, cette agriculture répondrait à des questions d’environnement, de sécurité alimentaire, à des questions sociales et économiques.
Du point de vue de l’environnement, l’agriculture urbaine tend à absorber la pollution de l’atmosphère dans les villes. Elle serait également actrice dans la réduction du ruissellement des eaux, la protection des zones fragiles (en particulier celle touchée par les érosions), le traitement des déchets fermentescibles et fournit un habitat pour les agents polinisateurs, influant ainsi sur la protection de la biodiversité.
Pris d’un point de vue économique, l’agriculture urbaine influerait sur l’économie des ménages. En effet, en permettant aux familles de produire elles-mêmes de quoi se nourrir, la charge financière baisse et permet à ces dernières de faire des économies.
Cet état des choses influe, in fine, sur les rapports sociaux. Car il fait bon de vivre dans une ville où les besoins environnementaux et de sécurité alimentaire sont satisfaits. En notant, par ailleurs que grâce à l’agriculture urbaine, les villes peuvent aménager des espaces verts, favorisant ainsi les loisirs au sein des communautés.
Le Burundi devrait valoriser l’agriculture urbaine
Au regard de tous les points positifs dont elle est créditée, l’agriculture urbaine est une solution adéquate aux soucis, à la fois, alimentaires et environnementaux pour l’épanouissement des zones urbaines. Mais alors, quelle est la situation du Burundi dans ce domaine ? Il est important de souligner que les populations burundaises, aussi bien dans les villes que dans les zones rurales s’adonnent aux pratiquent agricoles. Il n’est pas rare d’apercevoir des jardins et potagers dans différents espaces privés ou public des villes.
Cependant la pratique souffre encore d’un manque de vulgarisation et de promotion. Pour le Professeur Manirakiza, la pratique ne perdrait pas à être valorisée et mise au centre des bonnes pratiques pour une ville viable et propre.
Par ailleurs une politique de gestion urbaine des espaces verts et cultivables devrait être mis en place pour permettre aux villes de s’auto-suffire, en palliant elles même aux besoins alimentaires des populations urbaines,réduisant ainsi la dépendance des villes aux campagnes.
Il semble donc pertinent de dire que l’agriculture urbaine serait l’une des solutions, si ce n’est la solution à la sécurité alimentaire tout en étant protectrice de l’environnement. Un environnement de plus en plus fragile et qui mérite, aujourd’hui plus qu’hier, d’être protégé.
Moïse MAZYAMBO