Le slam burundais accouche bientôt un médecin. Elle s’appelle Élodie Diane ISHIMWE. Slameuse depuis 2009, ce médecin en herbe s’est consacré au « spoken word ». Aujourd’hui, ce carabin en 6ème à l’Université de Ngozi s’efforce de faire en sorte que le slam et la médecine s’allient à merveille. Mais comment fait-on pour combiner la passion du slam à des études aussi prenantes que la médecine ? Nous faisons le point avec Élodie Diane ISHIMWE.

Élodie Diane ISHIMWE, lors de la conférence de presse de la deuxième édition du festival Vuga en 2020. ©Akeza.net
Élodie Diane ISHIMWE marie l’art de guérir et l’art du langage. Pour elle, ces « deux arts » sont intimement liés pour leur côté « écoute ». « A mon avis, quand on est slameur, on sait comment écouter pour déterminer la manière dont on s’adresse aux gens. Le slam me permet de mieux être à l’écoute des patients, parler avec eux aisément pour qu’ils se confient facilement à moi« , confie-t-elle.
La passion comme porte d’entrée
Au début, Élodie Diane ISHIMWE écrivait des poèmes. C’est quand elle était en neuvième année qu’elle s’est prise de passion pour le slam. Elle a donc intégré le collectif Phoenix qui réunissait les pionniers du slam au Burundi. Plus tard, elle commencera à monter sur scène. Ainsi, elle se voit offrir l’opportunité de prester à Kigali au Rwanda à Ishyo Art Center. En 2012, elle remporte haut la main le concours ‘’Le Lac Tanganyika, un trésor à protéger’’ à l’occasion de la célébration de la journée nationale du lac Tanganyika. Dès lors, elle prend confiance et décide de se frayer un chemin dans l’art de la parole libre.

Élodie Diane ISHIMWE sur scène à l’Institut Français du Burundi en janvier 2022. Akeza.net
Parfois, les belles choses se suivent comme de belles mélodies. Élodie Diane qui rêve de devenir médecin ou encore chirurgienne va s’enrôler à la faculté de Médecine de l’Université de Ngozi à la fin de ses études d’humanités générales en section Scientifique B sans lâcher le slam!
Pour Élodie Diane, le slam est un hobby. Ça l’aide à aérer la tête pour bien étudier. Elle sait alors comment s’organiser. « Pour gérer mes «deux amours », je sais comment les dissocier. Quand je ne m’occupe pas de médecine, je me concentre sur le slam. Quand je révise mes notes ou quand je suis en stage, je mets de côté le slam. Quand j’ai un peu de temps libre, je me concentre sur mes textes« , indique-t-elle.
Prouver que tout est possible
En dépit de ceux qui chantaient pouilles à l’audacieuse slameuse, Élodie Diane n’a pas jeté l’éponge. Elle continue de marier le slam et la médecine. « Il y a des gens qui me disaient «tu tapes à côté. Tu ne peux pas prétendre devenir médecin et monter sur scène. Tu es entrain de vilipender la carrière du médecin». Heureusement, il y a d’autres personnes qui m’encourageaient. Elles me disaient que je suis une femme forte« , révèle-t-elle.

Élodie Diane ISHIMWE, futur médecin. ©Akeza.net
Élodie Diane ne s’est donc pas découragée et aujourd’hui, elle boucle son année terminale en médecine. Elle se réjouit de n’avoir pas abandonné le slam, d’avoir pu prouver à ceux qui en doutaient que tout est possible quand on a une vision. «Aujourd’hui, je suis en stages de fin de mes études universitaires en médicine. J’aimerais aller plus loin et faire la chirurgie tout en restant une slameuse pour enfin montrer à ceux qui me décourageaient que j’ai su allier le slam à la médecine« , dit-elle.
Grace au slam, Élodie Diane ISHIMWE a pu découvrir le continent africain.« Je suis allée à Kigali en 2012. En 2018, je me suis rendu en Ouganda pour la semaine de la Francophonie. En 2020, 2021 et 2022, j’étais invitée au festival Amani à Goma, en République Démocratique du Congo. En 2021 j’ai aussi été invitée au Niger où je prenais part au sommet des filles africaines, en tant que slameuse».

Élodie Diane ISHIMWE, au festival Amani de 2022 à Goma, en République Démocratique du Congo. ©Akeza.net
Au Burundi aussi, la slameuse Elodie Diane a déjà presté lors de plusieurs événements de grande envergure. «Le 08 mars de 2021, au stade Ingoma de Gitega, j’ai slamé devant le Président de la République. Je suis aussi souvent invitée dans différents événements de la première dame via son organisation OPDAD-Burundi. En outre, je gagne des marchés des entreprises, associations…, et du coup, je retourne avec quelques billets dans ma poche« , se réjouit-elle.
Bien plus tard, dans le monde professionnel, Élodie Diane ISHIMWE ambitionne de continuer à exercer les « deux arts » auxquels elle s’est consacré. « J’aimerais montrer aux autres qu’on peut être à la fois médecin et peintre ou chanteur, slameur, dessinateur, graffitiste… Mon souhait est que les gens coupent court avec la mauvaise habitude de traiter les artistes d’autres noms« , conclut-elle.
Melchisédeck BŌSHÍRWA