David Manirakiza, un modèle de résilience

David Manirakiza, un modèle de résilience

Selon les chiffres fournis par l’Union burundaise des personnes vivant avec handicap (UPHB), 15% de la population burundaise vivent avec handicap. La plupart d’entre elles vivent de la mendicité. Or, la mendicité suscite parfois la honte aussi bien par ceux qui mendient que par ceux qui font l’aumône. David Manirakiza, un jeune homme handicapé de Bujumbura refuse ce mode de vie et entreprend son petit commerce. 

 

Assis sous un vieux parapluie cousu de sachets en plastique, David Manirakiza attire l’attention de tout passant grâce à son air jovial. A longueur de journée, David vend de l’eau, des cigarettes, des unités de recharges ainsi que des pochettes de téléphones. Dans son  petit coin situé à la jonction de l’avenue de la RDC et de la chaussée Mwezi Gisabo, David attire tous les regards des passants avec son« Karibu Kiriya » (bienvenu client).  C’est dans cet endroit  qu’il gagne de l’argent  pour subvenir à ses  besoins et à ceux de son frère Innocent. « Chaque soir je rentre avec deux milles, voire trois », dit-il.

 

Des rêves fauchés par un cancer

 

 

David fréquentait le Lycée Municipal de Kinama en classe de 7ème année quand il contracte une maladie mystérieuse. Il croit à un empoisonnement et se rend chez un guérisseur du quartier. Celui-ci ne sera pas en mesure de soulager sa douleur. David se résout finalement à aller se faire soigner dans un hôpital. Trop tard. Les médecins vont  diagnostiquer un ostéosarcome. C’est un cancer relativement rare chez les enfants et les adolescents. Un autre calvaire venait de commencer pour David. A  côté de  celui d’être déjà orphelin de père et de mère. Une longue hospitalisation  (deux ans) au Centre Médico-chirurgical de Kinindo (CMCK)   se conclura par une amputation de sa jambe gauche.

 

La fin d’une illusion

 

 

David, comme tout jeune adolescent de son âge,  nourrissait en lui des ambitions sans limites. Il  était déjà connu dans son quartier en  zone Kinama  comme un joueur de football,  aux talents hors normes.  « A l’époque, je rêvais de devenir un grand joueur de foot de renommée mondiale » dit-il en souriant. Mais de retour chez lui, après des années d’hospitalisation, il n’était plus perçu comme David d’antan par ses camarades. Il revenait  sans sa jambe gauche. Il n’avait pas de prothèse et  était  obligé de se déplacer à l’aide de  deux béquilles en bois. Loin de se laisser abattre, le jeune amputé décide de se battre. Pas question de prendre son handicap comme une excuse pour rester oisif.

 

Le manque de capital, sa plus grande difficulté 

 

 

L’idée de faire du commerce ne lui avait jamais, jusque-là, effleuré l’esprit. Entre temps, suite à son handicap,  son  avenir inquiétait  sa famille. « Mon oncle me demandait chaque fois  ce que j’allais devenir avec mon handicap et, j’ai réalisé que je ne pouvais  être ni maçon ni aide maçon », se souvient-il avec amertume. En 2016, David reçoit une somme de quinze mille de la part d’une parenté. C’est à ce moment qu’il décide de se lancer dans la vente des cacahuètes, de biscuits et des cigarettes. « Les débuts ont été  difficiles. Les autres vendeurs des mêmes produits se déplaçaient d’un bistrot à un autre alors que ma mobilité était limitée », se souvient-il.

 

Malgré la situation, le jeune David  persévère. Alors que les affaires commençaient à prospérer, David devient victime d’un cambriolage en 2018. Il indique que des  marchandises d’une valeur de plus de cent mille francs burundais ont été emportées par les bandits .Face à cette mésaventure, David n’a pas du tout désarmé. Il va reconstituer son capital  qui atteindrait, d’après ses estimations, les trois cents mille francs burundais. « Les quelques produits qui sont sur la table ne sont que des échantillons, les autres sont gardés dans les stocks », reconnait-il. Malgré la fierté qui illumine son visage, David reconnaît tout de même que la plus grande difficulté qu’il a dans l’exercice de sa profession est le manque de capital.

 

Albéric NDAYIRUKIYE