La pandémie de Covid-19 préoccupe le monde de par sa rapide propagation et sa facile contamination. Partout au monde, elle laisse des traces à travers l’affaiblissement du système économique et les capacités sanitaires tant sur le plan mondial que sur le plan national. Cet article fait le point sur certaines conséquences de ce fléau sur la vie socio-économique des familles burundaises.
Une survie incertaine
Les conséquences de la Covid-19 se remarquent particulièrement dans la vie des populations autour des zones frontalières. Dans ces localités, plusieurs familles vivent d’un petit commerce transfrontalier. Ces familles sont directement touchées par la fermeture des frontières, mesure décrétée par l’Etat dans un effort de juguler la propagation de ce virus oh combien contagieux. Les familles qui vivaient de ce commerce souffrent.
Les agents de santé qui sensibilisent sur l’application des mesures barrières contre la propagation de la pandémie témoignent des cas d’abandons scolaires liés au désœuvrement des parents dont la survie des familles dépendait essentiellement du petit commerce transfrontalier. « Nous avons recensé 38 cas d’abandons scolaires liés au manque de matériel scolaire car les parents vivaient de ce petit commerce transfrontalier qui n’est plus possible avec la fermeture de la frontière burundo-congolaise du côté de Rugombo », déplore Gabriel Nsabiyumva, un des agents.
Gabriel Nsabiyumva.©Akeza.net
Ce regain d’abandons scolaires engendre pas mal de conséquences qui influent directement ou indirectement sur la vie des concernés. Gabriel Nsabiyumva confie que la plupart d’abandons scolaires finissent par des mariages précoces pour les filles et la consommation de stupéfiants pour les garçons, ce qui est néfaste pour leur développement aussi bien intellectuel que physique.
L’union des familles menacée
Les effets de la covid-19 ne se limitent pas uniquement à l’économie des familles. Certaines d’entre elles ont dû être séparées malgré elles. A l’origine de cette séparation : la fermeture de la frontière entre le pays de Lumumba et le Burundi au Sud et à l’Ouest du pays. La province Rumonge connaît des familles dont les maris ont été bloqués au Congo, où ils étaient allés chercher de l’emploi. Par conséquent, leurs femmes seules ont du mal à subvenir aux besoins des familles. A cela, s’ajoute la problématique d’abstinence aux réclamations du corps car les couples séparés ont tendance à s’exposer au concubinage pour les uns et l’abandon définitif des familles pour d’autres, ce qui se répercute inévitablement sur la santé et l’éducation des enfants issus de ces ménages.
« Nous nous sommes regroupées pour échanger sur nos difficultés en tant que femmes dont les maris sont au Congo, et il nous est même arrivé de pleurer toutes ensemble. C’est vraiment malheureux. Avant la crise de covid-19, nos maris allaient travailler au Congo et revenaient au bout d’une courte période avec une somme qui pouvait nous aider en famille. Mais avec ce fléau, des mois et des mois s’écoulent sans que nos maris ne reviennent ni n’envoient de l’argent pour les familles. Il est vraiment difficile pour nous d’élever nos enfants en absence de nos maris », s’indigne Chimène dont le mari est resté bloqué au Congo après la fermeture des frontières.
Chimène dont le mari est resté bloqué au Congo après la fermeture des frontières.©Akeza.net
A côté de ces préoccupations relatives à la survie des familles, ces femmes s’inquiètent que leurs maris ne prennent d’autres femmes au Congo, ce qui ne ferait qu’enfoncer le clou dans la plaie. « Nous détenons des informations selon lesquelles nos maris auraient même pris d’autres femmes au Congo. Si ces informations s’avèrent vraies, nous ne voyons vraiment pas comment nous pourrons vivre avec les enfants ici. Notre avenir serait quasiment incertain », ajoute-t-elle.
La Covid-19 qui fait trembler le monde entier exige que les Etats (dont le Burundi) prennent des mesures adéquates, afin de limiter la propagation de la pandémie. Pour le cas de personnes bloqués à l’étranger, l’organisation d’un rapatriement massif serait une piste de solution.
Thierry BAMPORIKI