Cela fait plusieurs semaines que l’Amicale des Musiciens du Burundi traverse une crise au sommet. Un feuilleton aux contours opaques qui laisse planer quelques doutes sur l’avenir de cette institution vieille de 34 ans. Alors que Freddy KWIZERA alias Botchum est appelé à abandonner ses fonctions, le nom de Haruna IKORICIZA est cité pour le remplacer à ce poste. Le patron de IKOH Entertainment serait également nommé à la tête de la commission chargée d’organiser les élections au sein de l’AMB. Une situation embarrassante qui le pousse aujourd’hui à sortir de son silence et de nous dévoiler le fin mot de cet imbroglio administratif qui mine l’avenir de l’AMB. Sera-t-il le nouveau président à l’intérim ou va-t-il prendre les rênes de la commission des élections ?
Ça part dans tous les sens
Pour comprendre la position de Haruna IKORICIZA, il est important de mettre les choses dans leur contexte.
Tout commence par une lettre du conseil des sages de l’Amicale des Musiciens du Burundi, datée du 19 août 2020. Celle-ci, adressée à Freddy KWIZERA, demandait l’organisation des élections pour la présidence de l’association et l’établissement d’un calendrier pour lesdites élections. Une mission inscrite dans le mandat du Président ad intérim. Consécutivement à cette lettre, le conseil des sages de l’Amicale aurait pris la décision de réclamer la démission de Botchum de la présidence pour laisser sa place à un autre. Ce dernier aura la mission express d’organiser les élections dans les 6 mois à venir. Selon le conseil des sages, Haruna IKORICIZA était le meilleur candidat à ce poste. Jusque-là, les choses semblaient claires et limpides.
Cependant, Freddy KWIZERA a adressé une réponse au conseil des sages en réponse à la lettre du 19 août. Dans sa lettre, il informe qu’une commission chargée d’organiser les élections à déjà été mise en place en nommant le même Haruna IKORICIZA à la tête de ladite commission. Le flou s’installe autant pour le nommé que pour l’ensemble du public et des membres de l’Amicale. Difficile de démêler le vrai du faux. Pour sa part, Haruna se retrouve dans une position inconfortable.
La vérité selon Haruna
À la fois remplaçant et membre de la commission électorale de celui qu’il est censé remplacer, Haruna IKORICIZA ne sait plus où donner de la tête. Et pour mettre les choses au clair, il donne sa version des faits.
« J’ai été contacté par le conseil des sages après qu’ils aient écrit à Botchum. Ils m’ont effectivement demandé si j’étais d’accord pour prendre la présidence de l’Amicale et d’organiser les élections dans un délai de 6 mois. Après avoir lu la lettre qui m’était adressé et jugé de sa pertinence, je leur ai fait savoir que je ne serai pas contre le fait de jouer ce rôle, mais qu’il serait judicieux d’attendre la fin des 18 mois octroyés à Botchum et de prendre le relais ensuite. Je suis ensuite entré en contact avec le staff de Botchum avec qui nous avons fait le même constat. En même temps, avec des membres éminents de l’Amicale, notamment ceux de l’étranger, nous avons discuté et nous avons jugé que c’était la meilleure chose à faire », nous dit Haruna qui, convaincu du bien-fondé de cette décision, attendait le 4 octobre, date de la fin du mandat pour prendre la responsabilité d’organiser les élections.
Cependant, les choses avaient pris une autre tournure sans que le concerné ne le sache. La décision de faire de lui le président d’une commission électorale venait d’être prise et il ne va l’apprendre qu’à ses dépens.
« Il se trouve que Botchum avait répondu au conseil des sages. Dans sa lettre, il me nommait à la tête d’une commission pour organiser les élections. Une copie de cette lettre à également été envoyée au Ministère de la Culture. C’est en discutant avec un agent du Ministère de la culture que je l’ai appris. J’avais du mal à comprendre ce qui se passait. J’ai alors décidé de contacter les personnes supposées faire partie de cette commission. Et il s’avère qu’aucun d’entre eux n’en avait été notifié », explique-t-il.
Il va décider de protéger ses arrières en adressant une lettre au Ministre de la Culture pour se dédouaner de toute responsabilité. « Face à cette situation, j’ai décidé d’écrire au Ministre de la Culture pour notifier le fait que je n’étais pas au courant de cette nomination et ce jusqu’à ce que j’en sois officiellement notifié. Je ne voulais pas être associé à des choses que je ne connaissais pas », nous explique Haruna.
La position de Haruna
Être cité pour deux postes met Haruna dans une position inconfortable et le pousse à prendre des dispositions pour se prémunir de tout désagrément.
« Pour ma part, je ne suis à la tête de rien puisque je n’ai pas été officiellement notifié de ces différentes nominations. Du reste, en accord avec le conseil des sages, la décision prise au départ est celle de laisser Botchum finir son mandat qui prend fin le 4 octobre. Après cette date, nous attendrons la décision du conseil quant à la suite des événements. Il ne reste plus que quelques jours. Donc nous pouvons attendre. » rapporte Haruna
Cependant, l’idée d’assumer des responsabilités au sein de l’Amicale est loin d’être exclue par Haruna. Pour lui, cela reste possible pour autant que certaines conditions soient remplies.
« Sincèrement, tous ces postes sont bons et je ne peux pas les refuser. Je suis membre de l’Amicale et je travaille pour la musique. Je ne peux être contre le progrès. Seulement, il faudrait de la sincérité et que l’on arrête de se mentir. L’association est là pour les artistes et elle devrait servir les artistes et non des individus. S’il y aura des élections correctes et que les membres veulent que je sois à la tête, j’accepterai ce rôle. Mais si le désordre continue à régner, cela sera compliqué. Il faudrait que les gens décident de travailler pour le bien de tous et que les intérêts partisans soient mis de côté, que l’Amicale redevienne une association pour les artistes et que l’on se mette tous d’accord pour travailler au progrès de celle-ci pour que j’accepte de devenir président de l’association », confit-il.
En levant le voile sur sa position dans cette affaire, Haruna IKORICIZA veut surtout afficher sa volonté de voir une amicale au climat apaisé. Du moins c’est ce qu’il dit vouloir. Par ailleurs, il se dit prêt à prendre la parole pour les artistes.
La suite des événements nous dira bien ce qu’il en sera.
Moïse MAZYAMBO