« Pour le moment, c’est impossible de vivre de son sport au Burundi ». C’est la conclusion qui a été tirée lors d’un Talk-show organisé par DNF (Dieudonné NAHIMANA Foundation) ce dimanche 02 août 2020 à l’Oasis Christian center à Kinindo. Un échange-débat dédié à la vie sportive au Burundi auquel ont pris part des athlètes burundais en activité évoluant à l’international, des athlètes à la retraite ainsi que des représentants des différentes fédérations et associations sportives.
Animé par Dieudonné NAHIMANA, fondateur de DNF, le talk-show mettant à l’honneur le sport burundais posait la problématique de savoir si on peut vivre de son sport au Burundi. Une question cruciale qui méritait d’être débattue, car elle constitue un grand défi pour les sportifs burundais évoluant au niveau local.
Avant de nous étaler sur le sujet du jour, les orateurs dont l’athlète de renommée internationale sur 800m, Francine NIYONSABA (présente), Inès NEZERWA dit Giti (basketteuse émérite annoncée en Allemagne, jointe par vidéo-conférence) et Billy Scott IRAKOZE (ex-champion national en natation qui fait ses études au Kenya, joint également par vidéo-conférence) ont offert un tour dans leur carrière entre des débuts difficiles et leur ascension.
« Il n’y a pas de sponsor »
Ayant déjà marqué un pas considérable dans leur carrière, les 3 athlètes se sont mis d’accord qu’au Burundi c’est pratiquement impossible de vivre de son sport. « Il n’y a pas de sponsor. Les entreprises n’investissement pas dans le sport. De plus, au niveau du pays, il n’y pas de réglementation sur le sport. Ce qui fait que les sportifs évoluant au niveau local ne peuvent pas vivre de leur sport puisqu’ils ne sont pas rémunérés », ont-ils affirmé.
C’est le même son cloche pour d’autres intervenants à l’instar de l’athlète international Antoine GAKEME (800m), Elsie UWAMAHORO (ancienne nageuse olympienne à la retraite), Charles NKANZAMYAMPI (ancien athlète à la retraite) ainsi que les représentants des associations et fédérations sportives du Burundi. « Les sportifs burundais qui sont parvenus à vivre de leur talent dans le sport sont ceux qui évoluent au niveau international mais pas sur le plan national », renchérissent-ils.
Que faire ?
Afin de pallier à cette problématique, les intervenants ont émis quelques suggestions entre autres : revoir la loi qui régit le sport au Burundi en y ajoutant les textes d’accompagnement basés sur la loi sur le sponsoring, la rénovation des infrastructures pour qu’elles puissent accueillir beaucoup de personnes, ce qui pourra faire des entrées, la mise en place d’un fonds pour le sponsoring des sportifs. Ils ont également interpellé les entreprises et sociétés burundaises à investir dans le sport afin de permettre aux sportifs burundais de vivre de leur sport.
« Je suis ce que je suis aujourd’hui grâce au sport. Par exemple aux USA, le sport fait partie de la politique du pays. Les entreprises et les sociétés nouent des partenariats soit avec les joueurs soit avec les clubs qui portent leur marque. Ce qui veut dire que c’est en quelque sorte une publicité de leurs produits », explique Inès dit Giti. Pour Billy Scott, les joueurs font de leur mieux mais ils ont besoin de motivation pour qu’ils puissent pousser loin leurs performances.
Encore du chemin à faire
Si les autres se veulent optimistes en indiquant que la mise en place d’une loi sur le sponsoring pourrait réparer l’écueil, Francine nuance un peu. « Au Burundi, je reste pessimiste sur ça. Ceux qui devaient aider l’athlète à prendre l’envol ou à progresser ce sont eux-mêmes qui sont des obstacles, qui lui mettent les bâtons dans les roues, qui le sucent. C’est pourquoi, il est vraiment difficile que les sportifs évoluant au niveau local puissent évoluer. Tant que le sport continuera à être géré par des gens qui n’ont aucun background dans ce domaine, il est difficile d’espérer mieux».
L’ancienne championne nationale de natation Elsie Uwamahoro s’est réjouie de l’initiative de cet échange-débat. « C’est bien que les gens puissent enfin connaitre la réalité des choses. J’ai vécu dans cette situation sans sponsoring pendant longtemps et je savais que je n’allais rien gagné. C’est pourquoi beaucoup d’athlètes burundais se lassent et décident d’arrêter afin de passer à autre chose vu que ça devient difficile de tenir ».
En fin de conférence, l’animateur Dieudonné a indiqué que le sujet n’est pas clos. « Nous allons soumettre ces recommandations auprès des décideurs. Nous comptons aussi inviter d’autres fédérations pour qu’on puisse approfondir cette question et mettre en place des dispositions favorables permettant à nos athlètes de vivre de leur sport ».
Il est à noter qu’il existe une loi sur le sport, mise en place depuis 2019, mais qui n’a pas de textes d’accompagnement.
Fleurette HABONIMANA