Peinture: Pacifique NDAYIHEKE, le fils de peintre devenu peintre !

Peinture: Pacifique NDAYIHEKE, le fils de peintre devenu peintre !

Peinture: Pacifique NDAYIHEKE, le fils de peintre devenu peintre !©Akeza.net

Nous naissons probablement tous avec un don, un talent que l’univers a bien voulu nous offrir. Et si nous ne nous en servons pas tous, certains d’entre nous ont vu leur don s’imposer à eux, au point de modifier la trajectoire de vie qu’ils auraient bien voulu suivre. C’est le cas de Pacy NDAYIHEKE qui, malgré un cursus académique honorable, se retrouve aujourd’hui emporté par sa passion pour la peinture. Un destin atypique, à l’image de nombreux artistes. Et comme son père avant lui, Pacy écrit une page de l’histoire de la peinture au Burundi.

 

Une enfance baignée dans la peinture

A 34 ans Pacy NDAYIHEKE a baigné dans la peinture toute sa vie. Quoi de plus normal lorsque l’on est le fils de Méthode NDAYIHEKE. Pacy a donc grandi au milieu des crayons, peintures et tableaux. « Mon père, NDAYIHEKE Méthode, était un artiste un peu connu. Toute sa vie, il a fait la peinture comme profession. Donc j’ai grandi dans une famille d’artistes. Même mes oncles étaient des artistes. Mon père avait un atelier et autour de lui, il y avait toujours des artistes, sculpteurs, peintres etc. », nous raconte Pacy.

Alors que d’autres enfants ont des voitures ou des poupées comme jouets, pour Pacy c’était des crayons et des papiers. Difficile donc pour lui de se rappeler de la première fois qu’il a dessiné. Néanmoins, il se souvient de ses premières peintures.  Il commence à réaliser ses premières œuvres en 2007, à la fin de ses études secondaires.

Si Pacy a grandi au milieu des œuvres de son père et de cet univers artistique, le jeune homme était loin de vouloir faire la peinture comme plan de carrière. Il se tourne par contre vers une carrière « classique » en faisant des études en psychologie clinique et sociale. Mais comme le dit l’adage : « Chassez le naturel et il revient au galop ». Son diplôme de psychologie va très vite se retrouver dans un tiroir, puisque Pacy va décider de devenir artiste. Il jette son dévolu sur le cinéma d’animation et veux devenir réalisateur de films d’animation. Un rêve qu’il entretient encore aujourd’hui. Il suivra des formations en 2008. En 2010, avec quelques amis, dont Eddy MUNYANEZA, ils vont créer l’association « Camera Plus » dans le but de produire des films d’animation. Mais l’association a  du mal à survivre et devra s’arrêter.

Pacy NDAYIHEKE

Pacy NDAYIHEKE devant ses tableaux (Exposition « Splash »/TwoFiveSeven Arts Gallery) ©Akeza.net

Après cette mésaventure, Pacy va se tourner vers la peinture. C’est art qu’il pratique depuis plusieurs années. On est en 2015 et son aventure de peintre professionnel vient de commencer.

 

Je cherche encore mon style

Avant de devenir un peintre de carrière, Pacy peignait déjà depuis quelques années. Son amour pour le pinceau était plus un hobby qu’autre chose. Entre l’année 2007 (année qui marque la fin de ses études secondaires) et l’année 2010, le jeune artiste qu’il est tâtonne, à la recherche de son propre style. Car s’il est vrai qu’il est le fils de son père, Pacy ne veut pas se laisser engloutir par le style de celui-ci, il veut avoir son propre style. Et pour cela, une expérience va changer sa façon de percevoir son art.

« En 2012, je suis allé au Rwanda. J’étais invité pour une exposition. Il y avait de nombreux artistes de la sous-région. Des professionnels qui avaient des années d’expérience dans la peinture. En voyant leurs œuvres, j’ai eu envie de décrocher les miennes tellement je me rendais compte que mon niveau était très bas », nous dit-il. Un sentiment d’infériorité qui va semer en lui le désir d’apprendre et de perfectionner son art. En bon autodidacte, il va s’auto-former en usant de tous les moyens à sa disposition. « Dès mon retour du Rwanda, j’ai commencé à apprendre par moi-même. En faisant des recherches sur internet, en regardant les œuvres d’autres artistes et en peignant tous les jours et plusieurs fois avec des exercices et des matériels différents. Jusqu’à ce que je commence à voir que j’arrive à trouver mon propre style. Parce qu’en vrai, je cherche encore mon style. Je ne l’ai pas encore vraiment trouvé », explique Pacy.

Pacy NDAYIHEKE devant ses tableaux (Exposition « Splash »/TwoFiveSeven Arts Gallery) ©Akeza.net

Sur son chemin à la recherche de son style, Pacy NDAYIHEKE s’inspire d’autres artistes pour l’aider à définir son propre style. Il y a son père dont il définit le style comme « Trop compliqué pour le comprendre », le célèbre peintre Picasso qui avait de multiples façons d’exprimer sa pensé ou ses sentiments sur une peinture et le peintre Voka qui selon Pacy a le don de représenter une seule chose dans une multitude de formes. Artistes ayant en commun la difficulté ou même l’impossibilité de reprendre leurs œuvres. Cette caractéristique a permis à Pacy de traiter son art avec une telle rigueur. Le poussant à ne vraiment considérer importante que celles de ses œuvres qu’il ne saurait reprendre. « Lorsque je fais une œuvre et que je me rends compte que je peux la reprendre, je sais que je ne suis pas allé au bout de mon travail », confie-t-il. Un détail qui lui permet de rendre unique chacune de ses pièces

 

Créer l’harmonie entre les sentiments et la peinture

Tout artiste a besoin d’une muse, d’une source d’inspiration qui lui permet de coucher sur une toile l’expression ou le sentiment qu’il souhaite partager. Dans le cas de Pacy, c’est la vie sociale africaine et plus particulièrement la relation mère/enfant qui constitue sa plus grande inspiration. « Vous allez souvent trouver dans mes œuvres une mère et des enfants. Je ne sais pas mais chaque fois que suis quelque part où les enfants jouent, il y a quelque chose qui m’attire dans leur façon de jouer et de faire les choses innocemment. Cela m’impressionne et m’inspire. Je m’inspire également des images (photos). Je suis surtout attiré par les expressions sur les images. Le côté questionneur d’une position. L’intrigue que cela suscite lorsque l’on se demande ce que le photographe où le modèle a voulu exprimer », explique le peintre. Son idée est de trouver l’harmonie entre les sentiments et la peinture.

Les tableaux de Pacy NDAYIHEKE exposé à la galerie d’art TwoFiveSeven Art (Exposition « Splash ») ©Akeza.net

« Je veux également que l’œuvre que je peins ne soit pas simplement compréhensible dès le premier regard, mais qu’elle continue à parler même après l’avoir vu. Au-delà des formes, il y a aussi l’harmonie des couleurs, les parties sombres et les parties éclairées qui sont là pour une bonne raison. Il m’arrive des fois de ne pas toujours comprendre quand je peins mais j’arrive à le voir après et je veux ce même effet pour ceux qui regardent mes œuvres », renchérit Pacy pour qui le processus de création prend des allures de voyage vers une destination inconnue.

Justement, ce voyage vers l’inconnue pousse aujourd’hui l’artiste à se diriger vers la peinture abstraite. Une forme qu’il pratique déjà et qui semble mieux cadrer avec son processus créatif. « Je rêve dans l’avenir de ne faire que l’abstrait. Parce que je trouve que c’est purement artiste », dit-il.

 

Le meilleur est à venir

Bien que son art soit de plus en plus reconnu, Pacy reconnait que les arts visuels, et particulièrement la peinture, ont encore du mal à se faire une véritable place au Burundi. Néanmoins il se dit optimiste au vu des efforts qui sont fournis pour mettre en avant les talents burundais. « Dans la culture burundaise, il y a un manque d’éducation artistique. Surtout dans le domaine des arts plastiques (peinture, sculpture). Mais dans une époque où les gens sortent un peu plus vers l’étranger, ils ont commencé à se familiariser avec les arts plastiques. Aujourd’hui, je suis un peu satisfais de voir des jeunes de mon âge acheter des œuvres qui sont des fois très couteuses. Des jeunes qui prennent le temps de visiter les artistes, d’aller à des expositions. Il y a une forme d’amour naissant pour les arts plastiques », dit Pacy.

Les tableaux de Pacy NDAYIHEKE exposé à la galerie d’art TwoFiveSeven Art (Exposition « Splash ») ©Akeza.net

Une chose possible grâce au dévouement d’organisations comme TwoFiveSeven Arts qui permet aujourd’hui à des artistes de mettre en avant leur travail. Un collectif dont fait partie Pacy et qui a ouvert il y a peu la première galerie d’art permanente au Burundi. « Je suis ravi de l’arrivée de cette galerie, parce qu’elle fait la promotion des jeunes artistes. Il y a des jeunes qui ne savaient pas qu’ils pouvaient devenir des professionnels et cela donne de l’espoir ».

En attendant que le secteur se démocratise au plus grand nombre, Pacy NDAYIHEKE continue à travailler dans son atelier et prépare une exposition qui devrait se dévoiler bientôt.

 

Moïse MAZYAMBO

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